vendredi 25 mai 2007

Une maison en Haute-Loire

C'est une maison au détour d'un chemin.
La route qui y mène passe à travers un bois dense.

On y arrive la nuit. Il y a cette brume épaisse et onctueuse que l'on appelle "purée de pois" tout autour. Je n'y vois pas à cinq mètres.

Je reconnais à peine les environs, alors que je connais cette région comme on connaît ses camarades de jeux d'enfance, comme on connaît la maison où l'on passait ses vacances quand on était môme.
Finalement, un détail passe dans le minuscule trait de lumière que les phares percent à travers le nuit et le brouillard. Ce n'est qu'un petit bout de forêt, allié à la courbure de la route. Je sais où je suis.

De Haute Loire


Le bois à côté de la maison absorbe le peu de lumière qui filtre à travers les nuages. Quand on en sort, la maison se détache à peine dans l'obscurité.

On ouvre les portes et on cherche à tâtons comment mettre l'électricité. On craque allumettes sur allumettes et on finit par y arriver.
On allume les lampes.
On branche le frigo, on range les provisions.
Puis on est frappé par le calme.
C'est une maison aux murs épais qui respire la tranquillité.
Les environs sont très silencieux, avec juste les tous petits bruits de la campagne, la nuit.
On se sent un peu comme dans une forteresse, une ferme fortifiée de l'ancien temps. Comme sur un bateau sur la mer-campagne.
J'ai toujours l'impression d'être blotti dans cette maison. Même lorsque je suis dans la grande salle, avec rien à moins d'un mètre autour de moi.
Et puis j'ai l'image de cette maison avec plein de monde dedans. Des amis, des parents, des cousins, des cousines... C'est un peu comme si la maison gardait mémoire de tous ces gens. Comme s'il y avait plein de gens importants pour moi, là bas. Si c'est un bateau, c'est sûrement un peu une arche de Noé.

Comme c'est une maison dans la montagne, il y fait froid, alors on va chercher du bois dans la grange et on fait un feu dans la cheminée, en haut, sur la mezzanine.
Ensuite on cherche des couvertures, des draps et on fait son lit, bien couvert.

De Haute Loire


On s'y endort vite.
On y dort très profondément.

mercredi 23 mai 2007

Instant

Voilà un petit instant attrapé au passage de mon humeur changeante : je suis assis sur chez moi, face à mon écran, et je suis bien.

J'ai eu la journée le plus exécrable qui soit, ma chaise n'est pas très confortable, et l'écran n'est pas non plus un réconfort. Mais je suis bien...

La fenêtre est ouverte, il y a encore un peu de soleil, dehors, et j'entends sans les voir les hirondelles. Au son, elles s'en donnent à cœur joie : leurs cris joyeux laissent deviner leur vitesse. Ce vol rapide et enlevé, les changements de direction si brusques, mais sans à-coup. Je connais peu d'oiseau qui montre autant d'entrain à voler.

Les rapaces volent sans vivacité. Ils cerclent mollement, avec trop de fierté pour se laisser aller à un mouvement rapide. Pour attraper leur proie, ils cessent de voler et lui tombent dessus.

Les moineaux sont vifs, mais la multitude de petits battements d'aile que constitue leur vol donne toujours une impression de maladresse, de précarité.

L'hirondelle, elle, fend le ciel comme un rien, presque sans bouger ses ailes, apparemment sans effort, mais avec une vivacité effrénée, et en criant de joie. Tantôt avec d'autres hirondelles, tantôt seules. Sociable mais indépendante. J'aime bien.

Bref, c'est surtout une journée qui a été lourde qui est terminée. Des idées claires qui retrouvent pied dans ma tête enfumée par les lois de Murphy qui ont émaillé le jour.

Je retourne à mes photos ! (plein de nouvelles photos - pour bientôt- )

dimanche 13 mai 2007

Le torrent d'eau claire (3)

La route n'étant pas trop chargée, la voiture l'avale sans mal.
Une fois la voiture repue, nous étions arrivés.

Le bâtiment se tient là, debout, l'air un peu perdu au milieu du port. Derrière lui, il y a les chantiers navals, sur un côté le mouillage des gros navires, et devant lui le port de plaisance. Il doit se sentir un peu trop grand par rapport aux bateaux qui le regardent par en dessous ; il doit se sentir trop petit et trop massif par rapport aux grues du chantier.
C'est surement pour cette raison qu'il fait semblant d'être un bateau : il s'est entouré d'un bassin d'où il émerge.

Dedans, c'est sombre.
C'est une volière à poissons.
Ils sont juste de l'autre côté des parois de verre. Ils évoluent à portée de main.


Les enfants posent leurs mains sur les vitres pour essayer de les attraper.

Les poissons s'ennuient un peu à tourner en rond en n'ayant rien d'autre à faire que de regarder les humains qui passent de l'autre côté. D'un autre côté, il y a beaucoup plus de sortes d'humains que de sortes de poissons qui passent dans l'aquarium.

Bien sûr, il y a les stars. Les requins, les poissons scie. Ceux qui attirent tous les regards et ne se lassent pas d'exhiber leurs dentitions légendaires.
Il y a aussi la nouvelle coqueluche : le poisson clown. Depuis qu'il a fait du cinéma... Et pourtant, il ne peut pas dire qu'il ait fait grand chose pour le film.
Et les mérous s'emmerdent. Ils regrettent Cousteau.

Il y a, de l'autre côté des vitres, des enfants fatigués. Ils voudraient bien s'assoir, là, au milieu des poissons qui volent autour d'eux. Se rouler avec eux, un moment, sur la plage de sable au fond de l'eau. Enfin, sauf dans l'aquarium aux requins, bien sûr.

Au détour d'un couloir, une tortue. Je suis toujours frappé, à la vue d'une tortue. C'est tellement calme, profond, humble et gracieux. Elle se déplace vite, mais ses mouvements sont lents.
Je pense à Roald Dahl. L'enfant et la tortue. Le Garçon qui parlait aux animaux.

À la sortie, on ne sait plus exactement si c'étaient les poissons qui volaient ou nous qui nagions.
On a presque eu l'impression d'avoir été un invité dans leur univers.
En déambulant le long des murs d'eau, suivant les pas d'un Moïse architecte.

jeudi 10 mai 2007

Le torrent d'eau claire (2)

Il suffit d'un rien...

Une étincelle au cœur, qu'il batte la breloque ou non.
Juste cette volonté de sourire à la face du monde, qui change les choses.

Les gestes du quotidien fait si souvent le regard vide, les idées au ras du sol, se remplissent souvent d'une lumière grise et terne. Celle des néons du super-marché. Clignotante, maladive.

Ce jour là, il y avait un rien. Juste un petit rien. Peut-être la journée écourtée. Peut-être l'envie de rire de la veille qui faisait des ricochets sur le carrelage. Peut-être la couleur bleue-verte du ciel. Allez savoir...

Quoi qu'il en soit, le petit rien était là, et les immenses rayons métalliques, habituellement mangeoires pour consommateurs, se faisaient moins hostiles, moins impersonnels.
Ils nous proposaient de jouer à "lequel tu préfères ?" ou à "Tu penses quoi de ça ?".
Les rayons "alimentations" me parlaient de repas et non de nourriture, pour une fois.
Les rayons "biscuits" parlaient de gourmandise.
Les rayons vestimentaires d'élégance et parfois de choses plus charmantes...

Je ne me rappelle pas des gens, dans le magasin... Peut-être que ce Vendredi soir là, ils avaient tous décidé qu'ils étaient trop fatigués pour aller faire leurs courses et que nous étions seuls dans le magasin, avec juste une caissière qui aurait fait défiler nos achats sur le tapis, à la fin...

Alors que habituellement il pleut toujours sur les jours où je fais mes courses (un crachin détestable et gris), ce jour là avait décidé de me sourire et le soleil passait à travers le faux plafond du super-marché.

mercredi 9 mai 2007

Le torrent d'eau claire (1)

Quelquefois on attend. On attend le lendemain. On attend que ce lendemain termine.
Ce n'est pas de la résignation, pas de l'abattement, pas de l'ennui... C'est juste de l'attente. De l'impatience.

Des fois, on a les mains tellement embarrassées d'attente qu'il faut les occuper, à n'importe quoi, pour tromper l'attente.

Parfois on a envie de parler aux gens que l'on attend, de leur dire combien ça va être long ces heures à les attendre, mais tout doucement, parce qu'il arrive que ces heures soient longues pour eux aussi...

Une fois de temps en temps, l'attente tombe de haut.
Désarçonnée, décrochée, elle bat un peu des bras, étonnée, puis s'écrase avec un bruit mou sur le sol.
On appelle ça une surprise.
Ça donne envie de rire aux éclats. Ça donne envie de serrer dans les bras.
Ça donne envie de se moquer de son attente, tellement vaine, qui bat des bras sur la moquette pour essayer de se relever avec un semblant de dignité.