vendredi 23 février 2007

Balade à Angoulème

J'avais passé ma journée enfermé dans un box plein d'aboiements (du grognement d'avertissement au couinement plaintif en passant par les jappements soumis...).
J'avais passé ma semaine enfermé dans un projet, de ma chambre à l'école, et de l'école à ma chambre.

J'avais besoin de bouger.
J'ai pris mon appareil photo et je suis parti marcher, au hasard.
J'ai pris la direction d'une partie de la ville que je connais très peu et qui m'éloignait du centre.

Il y avait des jardins joyeux ou baroques, des arbres, des fleurs et du soleil. Sans que je m'en soit douté, les plantes étaient sorties de leur léthargie et bourgeonnaient en silence.
Le soleil avait encore la pâleur de l'hiver, mais les arbres avaient déjà les couleurs du printemps.
Peu d'oiseaux, peu de gens, mais les tiges frissonnantes et les bourgeons timides.

Je me suis éloigné de la zone résidentielle, je me suis rapproché de la zone industrielle. La frontière entre ces deux mondes est matérialisée par la voie de chemin de fer, mais la transition se fait malgré tout petit à petit.
Les maisons sont de moins en moins proprettes, les jardins de plus en plus sauvages.
Alors que les maisons du côté résidentiel étaient toutes assez semblables, avec leurs murs bien blancs, leurs grandes fenêtres impeccables et leurs haies taillées ; du côté de la voie ferrée, les maisons ont une personnalité.

Il y a celle qui est à moitié bâtie et à moitié bricolée. Elle n'a pas beaucoup de fenêtre, mais l'atelier en tôle ondulée semble prévu pour permettre de bricoler dans la cour de la maison en été.

Il y a la maison des petits vieux. Avec ses rideaux hideux d'un blanc passé. Elle est très haute et toute étroite, perchée au dessus de la voie ferrée.

Il y a la maison-potager. Elle me fait penser aux jardins-ouvriers de Saint-Etienne. C'est tout juste une cabane à outils, avec les volets fermés et le toit en piteux état, mais un potager superbe. La maison doit être jalouse des plantes : autant elle est négligée, autant elles sont entretenues...

Il y a bien sûr le bistrot, avec sa pancarte ternie qui annonce le plat du jour. Les vitres sont jaunes et les murs brunis. Ça en fait une maison très unie. J'imagine des camioneurs en pull, une cigarette papier-maïs au bec, en train d'y boire une bière graisseuse. Je passe mon chemin...

Il y a la maison des jeunes gens. Elle est en piteux état. Rien ne bouge à l'intérieur, mais il y a de la buée sur les vitres. Une mobylette rutilante est garée devant la porte.

Et puis il y a la grande oubliée. C'est la doyenne du coin. Une maison sûrement belle, autrefois, mais qui a été rattrapée par la "banlieue". Maintenant à l'abandon, son toit d'ardoises est dégarni. Elle est haute et fière, malgré le poids des ans. Elle a une architecture complètement différente, avec une petite tour au coin.

Après, j'étais dans la zone industrielle. Avec cette lumière polaire des soirs limpides d'hiver. Il n'y avait personne en vue alentour. Pas de bruit non plus (un week-end, à cette heure là...).
Les usines sont comme des monstres endormis, ou des temples désertés.
Un silo immense se profile, un peu plus loin.
Ça m'a fait penser à un site que j'avais vu, une fois.
(J'en parle un peu ici)

Et puis je suis rentré. J'avais mal aux jambes. J'étais bien.

J'ai quelques photos, ici.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

merci beaucoup pour cette jolie ballade solitaire, ces descriptions si sensibles, ces photos émouvantes...j'aime beaucoup celle des soi-disant "roses trémières", qui est un peu "triste" (ce n'est pas tout à fait le mot, mais je ne le trouve pas), et aussi celle de la flaque d'eau...j'ai l'impression qu'elles respirent quelque chose de cette solitude...mais c'est peut-être seulement une question d'état d'esprit.
très touchant en tout cas...Très.

Peterson Gash a dit…

Tu inaugure mon blog en l'honorant d'un commentaire ! ^^
Et quel commentaire !
Merci, c'est très gentil.
Ce que j'aime bien, dans la photo de la flaque, c'est que la petite rigole d'eau apporte un peu de printemps : des feuilles, des graines, des aiguilles.
Merci pour ces très jolis compliments. De touchant à touché ^_^

Anonyme a dit…

On a envie de se blottir dans ce texte, et de dessiner les maisons à la craie.
On a envie d'aller se ballader dans les rues vides.

La photo de la mob bleue est professionnelle, celle de la flaque d'eau et du chemin de fer, presque.

Elles me plaisent, beaucoup.

Elles disent autre chose, le calme, la tièdeur, la solitude un peu, la sensibilité, surtout.
L'attache aux détails.. ça me fait penser à un film japonais, "Nobody knows", vraiment.

Un peu de printemps sur un soir fade, merci.